Nous avons appris avec stupéfaction que le siège du Parti d’Aboubacar Toumba Diakité, actuellement incarcéré à la maison centrale de Coronthie, sera inauguré ce samedi 21 septembre 2024 en haute banlieue de Conakry plus précisément au quartier Béhanzin près de Billy Ecole. Cette annonce soulève des questions quant à la légitimité et à la légalité de l’activité politique d’un homme condamné pour des crimes graves.
En République de Guinée, la Constitution garantit à tout citoyen âgé d’au moins 18 ans le droit d’exercer une activité politique, à condition de ne pas être sous le coup d’une condamnation. Aboubacar Toumba Diakité, ancien aide de camp du Capitaine Moussa Dadis Camara et chef de la Garde présidentielle lors du massacre du 28 septembre 2009 à Conakry, fait face à des restrictions significatives suite à sa condamnation à dix ans de prison.
Le massacre de 2009, où plus de 156 personnes ont perdu la vie et de nombreuses femmes ont subi des violences sexuelles, a été qualifié de crime contre l’humanité. Les organisations de défense des droits de l’homme désignent Toumba Diakité comme un des principaux responsables. Malgré ses dénégations lors de son procès, la gravité des accusations qui pèsent sur lui soulève des préoccupations éthiques quant à son retour en politique.
La loi guinéenne stipule également que les associations prônant la violence ou la discrimination sont interdites, ce qui complique encore plus la situation de Toumba Diakité. La légitimité de son parti est ainsi remise en question dans un contexte où les règles de sécurité et de stabilité sont primordiales.
Pour recouvrer ses droits civiques, Toumba Diakité doit passer par un processus de réhabilitation. Cela nécessite que ses avocats introduisent une demande auprès du tribunal qui a prononcé sa condamnation, prouvant sa réinsertion sociale et sa bonne conduite. Ce processus peut s’étendre sur plusieurs années et requiert une audience où la défense devra démontrer le changement de son client.
En attendant, Toumba Diakité doit adopter une attitude respectueuse envers les victimes du massacre, reconnaissant la souffrance causée par ses actes. Ce geste de contrition pourrait jouer un rôle crucial dans sa quête de réhabilitation.
L’inauguration de son parti, alors qu’il est encore sous le coup d’une condamnation, pourrait être perçue comme un défi à l’autorité de l’État et aux droits des victimes. Alors que la Guinée se trouve à un tournant de son histoire politique, il est essentiel de rester vigilant face aux implications d’un tel acte pour la justice et la paix dans le pays.
Par Aboubacar SAKHO
Juriste-journaliste