Après l’ex chef-d’etat major général des armées, c’est le contrôleur général à la retraite Ansoumane Camara, dit Bafoé, qui a commencé sa déposition en tant que témoin. C’est un fonctionnaire de police né le 15 août 1966 à Beyla. La loi sur la protection des témoins et des victimes lui confère des droits comme celui d’être entendu à huis-clos s’il le souhaite, lui a rappelé le juge.
L’officier de police a opté pour l’audience publique avant de préciser que présentement, il n’y a pas de liens de parenté ni de subordination entre lui et qui que ce soit du côté des accusés ou du côté des victimes.
Le juge Ibrahima Sory 2 Tounkara l’a invité à lever la main droite pour jurer de dire la vérité rien que la vérité dans cette affaire. Ansoumane Camara a commencé par rendre hommage aux victimes du massacre du 28 septembre. Il a aussi rappelé qu’il était le commandant de la Compagnie Mobile d’Intervention et de Sécurité No 1 Cameroun, la seule compagnie d’intervention dans le cadre du maintien d’ordre de la police nationale à l’époque.
À la veille du 28 septembre, a expliqué l’officier à la retraite, il a été appelé par le directeur général de la police nationale, le commissaire divisionnaire Valentin Haba. “Il m’a instruit dans un premier temps de consigner tous les hommes à la base sur instruction d’une réunion à laquelle il a pris part à l’état-major général des armées. Ce qui fut fait. Et le soir plus tard, il m’a dit que la manifestation est interdite. Il m’a dit de planifier mes hommes de la Cimenterie jusqu’à la périphérie du stade en passant par Lansanaya. Les points qui m’ont été indiqués, c’était la Fondis, Landreah Port, la station Oasis et la Pharma Guinée. Il a ajouté que l’esplanade et l’intérieur du stade devraient être gérés par le groupement de la gendarmerie qui était cantonné dans l’enceinte de la mairie de Dixinn”, a-t-il déclaré.
Ansoumane Camara dit avoir déployé ses hommes à 4 heures du matin. Dans les bandes de 9 heures, il était du côté de Cosa quand il a été appelé par le directeur général lui demandant de retourner au stade pour disperser les petits regroupements qui se formaient.
Pendant qu’il était dans cet exercice, l’officier a constaté, selon lui, l’arrivée du colonel Moussa Tiegboro Camara qui se faisait acclamer par des manifestants. “Il était venu dans le cadre de les sensibiliser. Ils l’ont applaudi. Il y avait assez de monde. Le ministre était même obligé de monter sur notre véhicule blindé pour s’adresser à la population. Le temps pour le ministre de finir, certains éléments de la foule ont commencé à lancer des cailloux. Pour sa sécurité, sa protection l’a descendu du camion et la foule a été dispersée jusqu’au niveau de Dixinn échangeur”, a précisé Bafoé.
Il était à la pharmacie Manizé quand son adjoint l’a appelé pour lui dire qu’il est en face de la crème de l’opposition. Il dit avoir informé le ministre Tiegboro de cette situation. Le patron des services spéciaux est partie vers eux, a confirmé Ansoumane Camara. L’officier n’a pas fini de parler avec les leaders, la foule a démonté le dispositif sécuritaire, s’est souvenu le témoin. C’est ainsi que les forces de l’ordre et les éléments de l’anti-drogue ont fui pour aller vers Donka et les manifestants ont rejoint le stade, a-t-il dit.
Après 13 heures, alors que lui et ses hommes dégageaient la voie, les militaires ont débarqué. Ansoumane Camara dit avoir vu deux camionnettes de l’armée plus un véhicule de commandement même s’il dit ignorer l’identité de celui qui commandait. ” Les agents sont descendus pour entrer dans le stade. Entre-temps, j’ai vu le commandant Toumba venir seul à pied à pas géant. Cela a trouvé que les éléments venus dans les camions sont déjà rentrés. Et les coups de sommation avant commencé à retentir. Nous-mêmes, on se sentait en danger. J’ai pris tous mes éléments, on est rentré au commissariat spécial du satde”, a-t-il révélé.
Il est resté à la rentrée du commissariat spécial du stade quand il a vu le commandant Toumba, puis le colonel Moussa Tiegboro Camara, ressortir avec des leaders. C’est après qu’il dit avoir joint le directeur général de la police à travers le numéro du chef de cabinet du nom de Toupou pour lui dire de venir constater ce qui se commettait au stade afin de rendre compte à qui de droit. ” Le DG est venu. On l’a accompagné. Il a constaté les faits. Moi-même j’ai vu des blessés et des morts. Après il est parti. Mes hommes composés de 10 éléments et moi, nous sommes rentrés à la base. C’est là-bas ma mission s’est arrêtée. Je n’ai plus rien suivi après >>, a indiqué l’officier de la police.
Après avoir été interrogé par le juge et les membres du parquet, l’affaire a été renvoyé au 4 décembre pour la suite des débats. Mais le juge a fait remarquer quelques contradictions entre le procès-verbal d’audition devant le pool des juges d’instruction et la déposition du témoin notamment sur les conditions dans lesquelles le commandant Aboubacar Sidiki Diakité dit Toumba est arrivé au stade. Dans son procès-verbal, Ansoumane a dit que Toumba son adjoint Marcel étaient à la tête des bérets rouges qui ont fait irruption au stade. Dans sa déposition ce mercredi, il dit avoir vu l’ex aide de camp de Dadis arriver seul à l’esplanade du stade.