Lutte contre corruption : un nouveau rapport pointe les faiblesses de la Guinée

by La Rédaction

Un nouveau rapport de l’Association Guinéenne pour la Transparence (AGT) révèle que même si la Guinée dispose d’un cadre juridique et de politiques anti-corruption substantiels, il y a un manque de mise en œuvre dans la pratique, ainsi qu’un besoin urgent de davantage de ressources humaines, matérielles et financières. ressources à tous les niveaux. Le rapport se veut une contribution au processus d’examen de la mise en œuvre de la CNUCC dans son deuxième cycle, produit avec le soutien technique et financier de la Coalition CNUCC.

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En général, la Guinée dispose d’un vaste cadre juridique et réglementaire couvrant la plupart des dispositions abordées dans les chapitres II et V de la CNUCC. Toutefois, ces mesures souffrent à la fois d’une mise en œuvre inefficace et d’un grave manque de ressources. Les défis incluent le récent changement de régime, qui a entraîné des retards dans la mise à jour de la stratégie nationale anti-corruption. Le cadre institutionnel actuel des politiques anti-corruption, y compris la supervision et la coordination de son application par l’ Agence Nationale de Lutte contre la Corruption et de Promotion de la Bonne Gouvernance (ANLC-PBG), dispose d’un budget insuffisant pour mener à bien son mandat. . Les dispositifs opérationnels mis en place sont confrontés aux ingérences des autorités administratives et politiques et aux pressions sociales ponctuelles dans le traitement des dossiers ; trafic d’influence; et le fait que les rapports de contrôle des différents organes de l’État sont souvent destinés aux autorités de contrôle qui décident de leur suivi. Des efforts notables ont été déployés pour inclure la société civile, mais leur portée reste limitée et l’accès à l’information reste difficile dans la pratique.

Concernant les dispositions du chapitre V de la CNUCC, des problèmes similaires persistent, car les retards dans la mise à jour de la stratégie nationale de lutte contre la corruption ont eu un effet d’entraînement, créant un obstacle à la mise en œuvre du comité national de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Le rapport révèle que la corruption et l’impunité croissantes au plus haut niveau de l’État se manifestent par des pratiques de blanchiment d’argent, la dissimulation d’avoirs mal acquis en Guinée ou à l’étranger ainsi que de comptes bancaires et de biens immobiliers et mobiliers. Le dernier régime dirigé par le professeur Alpha Condé de 2010 à 2021 a été caractérisé par une mauvaise gestion financière orchestrée par un système de gouvernance basé sur le clientélisme, le favoritisme et le népotisme.

Le processus officiel de révision de la CNUCC en Guinée a débuté en 2018, mais a connu de sérieux retards en raison du changement anticonstitutionnel de gouvernement et de la nomination d’un nouveau secrétaire exécutif de l’ANLC-PBG. Dans ce contexte, la nomination du point focal est devenue problématique, les nouvelles autorités guinéennes n’ayant pas envoyé la note verbale désignant un nouveau point focal au Secrétariat général de l’ONU au moment de la rédaction de ce rapport. Seule la liste des experts gouvernementaux est disponible sur la page de profil pays de l’ONUDC , mais le rapport d’auto-évaluation de la Guinée a été envoyé à l’ONUDC pour approbation. La Guinée n’a pas encore signé l’engagement de transparence de la Coalition de la CNUCC .

Pour des conclusions plus détaillées, lisez le rapport parallèle complet de la société civile en français . La version anglaise est à venir.

Principales conclusions

Organismes et politiques de lutte contre la corruption

Même si la Guinée dispose de programmes et de pratiques de prévention de la corruption qui encouragent une large participation des parties prenantes, les institutions manquent d’indépendance effective et souffrent d’un manque de ressources humaines, matérielles et financières pour être efficaces dans la pratique. Le retard dans l’actualisation de la stratégie nationale anti-corruption et dans la mise en place du comité national de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme constitue un autre obstacle majeur à l’application des dispositions légales anti-corruption.

La supervision et la coordination de l’application des politiques et pratiques anti-corruption dans le pays sont assurées par l’Agence Nationale de Lutte contre la Corruption et de Promotion de la Bonne Gouvernance (ANLC-PBG). Cependant, cette institution ainsi que les organes et institutions mettant en œuvre les dispositions légales et réglementaires relatives à la lutte contre la corruption et les infractions assimilées en Guinée souffrent également d’une faible dotation budgétaire et de ressources matérielles et humaines insuffisantes. Il existe un besoin urgent de spécialisation et de renforcement des capacités du personnel, afin de permettre au personnel de s’acquitter efficacement de ses fonctions.

Emploi dans le secteur public

Concernant l’emploi dans le secteur public, la loi portant statut général de la fonction publique définit le mode de recrutement pour le secteur public sur la base de concours, avec des critères de qualification précisés. Des mesures spécifiques de fidélisation et de promotion ont également été introduites dans la fonction publique, notamment des incitations telles que des lettres de félicitations, des encouragements, des primes et des statuts honorifiques. Dans la pratique, cependant, la fonction publique est en proie à des employés fictifs, des fonctionnaires sur le point de prendre leur retraite qui sont toujours en poste sans justification valable, entre autres fautes professionnelles. En outre, les officiers supérieurs sont mal rémunérés et manquent de ressources, ce qui constitue un obstacle supplémentaire à la lutte contre la corruption dans ce secteur.

Codes de conduite, conflits d’intérêts et déclarations de patrimoine

La loi de 2020 portant Code de conduite des fonctionnaires guinéens définit les critères et les procédures de conduite et encourage l’intégrité, l’honnêteté et la responsabilité parmi les employés du secteur public. Cependant, dans la pratique, il y a un manque de contrôle de la mise en œuvre de ce cadre juridique, et le manque de promotion des agents comme le prévoit la loi portant statut général de la fonction publique aggrave la situation.

Marchés publics et gestion des finances publiques

La loi de 2017 relative à la prévention, à la détection et à la répression de la corruption et des infractions connexes définit les règles et normes en matière de marchés publics, y compris les mécanismes de lutte contre la corruption. Le cadre de gouvernance des finances publiques et la loi de budget national fixent les procédures d’adoption du budget national et les délais de communication dans les délais des dépenses et des recettes de l’État. Cependant, dans la pratique, le code des marchés publics est mal connu et le budget citoyen n’est disponible que sous forme électronique, ce qui en limite l’accès aux personnes situées en dehors des zones urbaines.

Accès à l’information et participation de la société

La loi sur le droit d’accès à l’information publique définit les modalités d’accès à l’information publique. Toutefois, il n’existe aucun mécanisme de publication des informations issues des rapports périodiques sur les risques de corruption au sein de l’administration publique. Les dispositions de la loi protègent la liberté de rechercher, de recevoir, de publier et de diffuser des informations concernant la corruption, mais ces droits sont accompagnés de restrictions prescrites par la loi. La faible application de la loi sur l’accès à l’information, qui est également peu connue du public, et la rétention d’informations par les agents publics, présentent des défis pour l’accès à l’information en Guinée.

Les mesures prises pour accroître la transparence des processus décisionnels et promouvoir la participation du public à la lutte contre la corruption comprennent l’implication de la société civile et des médias dans le suivi citoyen de l’action publique, l’adhésion de ces acteurs aux Conseils d’Administration (CA) des Établissements Publics Administratifs (EPA) et projets d’envergure nationale. Les activités visant à informer le public de ne pas tolérer la corruption sont entreprises par le biais de déclarations du Premier Ministre, de campagnes d’affichage et de distribution de tracts, ainsi que de programmes de sensibilisation du public tels que des émissions interactives organisées par les médias publics et privés. Malheureusement, cela ne concerne pas les écoles et les universités.

Lutte contre le blanchiment d’argent

La Loi relative à la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme constitue le cadre juridique régissant la lutte contre ce fléau en Guinée. Cette dernière prend en compte les notions de prévention et de détection des transferts des produits du crime en Guinée, en s’inspirant des instruments et initiatives des organisations régionales, interrégionales et multilatérales telles que le GIABA, le GAFI et la CNUCC.

Le rôle des différents acteurs dans la prévention et la détection des transferts de produits du crime n’est pas connu du public, car cela est considéré comme un secret d’État. Il convient toutefois de noter les efforts déployés pour impliquer les acteurs de la société civile dans la sensibilisation et l’évaluation de divers processus, tels que le Mécanisme africain d’évaluation par les pairs (MAEP), l’auto-évaluation de la CNUCC, l’évaluation nationale des risques (ENR) et les Évaluation (ME) de la loi LAB/FT.

Mesures de récupération directe des biens

Conformément à l’esprit de la CNUCC, certaines mesures prennent en compte les exigences pour un autre État partie d’intenter une action devant les tribunaux compétents pour reconnaître le droit de propriété sur les biens acquis à la suite d’une infraction établie. Les dispositions contenues dans la loi LAB/FT et la loi anti-corruption , ainsi que le Code pénal et le Code de procédure pénale , définissent les pouvoirs et procédures de coopération internationale. Pourtant, en pratique, il est difficile de prouver l’application de ces différentes dispositions en raison du manque de transparence dans le fonctionnement du système judiciaire et de la rétention d’informations.

Coopération internationale aux fins de confiscation

La loi relative à la lutte contre la corruption et les infractions connexes traite de la procédure de confiscation à la demande d’un État étranger ainsi que des modalités de coopération spéciale. De même, la loi LAB/FT prévoit des dispositions sur d’autres formes de coopération internationale et les modalités relatives à la communication d’informations sur les produits d’infractions établies lorsqu’elle considère que la divulgation de ces informations pourrait aider un État partie à initier ou à mener une enquête. une enquête, des poursuites ou une procédure judiciaire ou pourrait conduire à la présentation d’une demande par cet État partie. Cependant, les services en charge de ce dossier n’ont pas fourni aux auteurs de ce rapport d’informations permettant d’évaluer la mise en œuvre pratique de ces dispositions.

La restitution et la disposition des biens confisqués

Le cadre juridique et réglementaire régissant la restitution des avoirs confisqués à la demande d’un État requérant est fixé dans la loi LAB/FT relative à la lutte contre la corruption et le Code de procédure pénale. L’une des mesures institutionnelles prises pour mettre en œuvre le cadre législatif relatif à la restitution et à la cession des avoirs est la création de l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC) dans le Code de procédure pénale. En pratique, un décret créant l’AGRASC a été pris en octobre 2022 et le décret portant nomination des membres du Conseil d’administration, en avril 2023. En août 2023, l’AGRASC est devenue opérationnelle avec le lancement de ses activités à travers la mise en place d’une équipe de direction et un conseil d’administration.

Recommandations clés

Dans son rapport, l’Association Guinéenne pour la Transparence fait des recommandations aux autorités guinéennes pour assurer la pleine mise en œuvre de la CNUCC, parmi lesquelles :

Diriger l’évaluation de la mise en œuvre par la Guinée des chapitres II et V de la Convention en publiant le rapport d’auto-évaluation, en signant et en transmettant la note verbale désignant le point focal et en invitant les pays évaluateurs ;

Promouvoir l’inclusion des parties prenantes (secteurs public et privé, acteurs sociaux) dans le processus d’évaluation du pays ;

Développer et/ou mettre à jour des outils de lutte contre la corruption et ses conséquences, tels que :

La stratégie nationale anti-corruption ;

La stratégie nationale de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme ;

Mécanismes de communication pour assurer la visibilité et la traçabilité dans la gestion transparente des fonds confisqués et/ou restitués ;

Le plan opérationnel d’une structure de coordination des actions des organismes chargés de mettre en œuvre les dispositions légales et réglementaires relatives à la lutte contre la corruption et les infractions assimilées en Guinée ;

Mécanismes visant à faciliter la fourniture d’informations sur des accords ou arrangements mutuellement acceptables pour la disposition finale des avoirs confisqués avec d’autres pays.

Assainir la fonction publique pour réduire le nombre de travailleurs fantômes ou de fonctionnaires qui devraient être à la retraite mais n’ont pas encore quitté leur poste ;

Renforcer les pouvoirs et l’indépendance des forces de l’ordre en leur allouant un budget conséquent et en mettant en place une structure de coordination des actions des agences qui mettent en œuvre les dispositions légales et réglementaires ;

Accroître la vulgarisation, la diffusion et l’appropriation des textes régissant la promotion de la bonne gouvernance dans les secteurs stratégiques, tels que le code des marchés publics, la loi relative à l’accès à l’information publique et le budget national de développement ;

Organiser des campagnes de sensibilisation et de plaidoyer auprès des décideurs pour rendre efficace la loi sur l’accès à l’information publique ;

Poursuivre et renforcer la mise en place de mécanismes et d’instruments de coordination des outils de promotion de la bonne gouvernance, tels que le Comité de coordination de lutte contre le blanchiment d’argent et l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC) ;

Renforcer les capacités des acteurs de la lutte contre le blanchiment d’argent, y compris la société civile et les médias, dans leur domaine afin de faciliter leur spécialisation selon les infractions et crimes dont ils ont affaire ;

Créer un tribunal spécialisé dans les poursuites, les enquêtes, les jugements et l’application des sanctions liées aux crimes économiques, financiers et autres infractions sous-jacentes de corruption et de blanchiment d’argent/financement du terrorisme.

Author: La Rédaction

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